4.C-1-2 Concrescence phase d, IUT, Barollière

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4.C. Phase d : les réalisations :

Au niveau de la ville, chaque réalisation est une nouvelle opération qui invite à recommencer toutes les phases à la nouvelle échelle considérée. Cette remarque introduit à la notion d’échelles indicatives de référence, et de subsidiarité active * entre ces échelles de référence (une illustration complète et pédagogique est proposée au chapitre 13.I, p.400-401, notamment figure 13-12 pour la région « Entre Vosges et Ardennes » aux échelles indicatives des 32 000 km2, 2 000 km2 et 125 km2). Le passage d’échelle se fait ici entre la ville (échelle indicative des 780 ha -env.8 km2, rayon de 1,6 km-) et le quartier (échelle indicative de 50 ha (rayon de 400 m) voire 3 ha (rayon de 100 m) et 2 000 m2 (rayon de 25 m pour un bâtiment précis). Chaque échelle génère un nouveau processus, articulé sur le processus général, et à l’échelle supérieure. La vie professionnelle ordinaire n’échappe pas à cette règle de subsidiarité de fait. C’est pourquoi chacune des réalisations est décrite selon les quatre phases du schéma de questionnement de base. L’entraînement à ainsi décrire les opérations est un entraînement à rédiger des fiches d’expérience, à les rendre transmissibles, à les mutualiser. L’enjeu est la capitalisation de l’expérience au sein des réseaux professionnels.

Les réalisations présentées concernent toutes Lunéville et sont en liaison avec la presentation qui vient d’être faite de cette cité : le Centre de Métrologie Lorraine, l’aménagement du quartier de La Barollière, le château d’eau, CAP 54 et la reconquête d’un espace commercial abandonné, enfin de l’aménagement du centre-ville. 〈124〉

4.C.1. Le Centre de Métrologie Lorraine : une prouesse technique et financière pour l’IUT de métrologie.

Phase a : le problème posé et la situation existante :

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Figure 4‑5 : Plan HERE de 1752 ; Plan de 1875 ; Plan de 1911 (inchangé en 1920) (Sources : Plans d’archives municipales scannés à l’échelle 1)

Le quartier de l’Orangerie n’était pas à l’origine un quartier de cavalerie. Sur le plan HERE de 1752, il prend l’aspect d’un jardin. Après la mort de Stanislas en 1766, le site fût transformé en caserne pour accueillir les Gendarmes Rouges. En 1770 et en 1787, il y fût ajouté plusieurs bâtiments érigés le long de l’actuelle rue de Lorraine. Le plan de ville de 1816 fait apparaître l’ensemble des bâtiments en fond de parcelle et le long de la rue des Bosquets. En 1825 et 1826, on fit l’acquisition de terrains à la ville pour bâtir une écurie et une forge. En 1855, une nouvelle écurie ainsi qu’un nouveau manège furent bâtis, puis 3 nouvelle écuries dans l’année qui suivit. En 1836, le quartier comptait 5 corps de bâtiments contenant 90 chambres dont 2 étaient affectés au logement d’un capitaine, 26 aux sous-officiers du petit état major. Les 62 chambres restantes pouvaient accueillir 857 lits. Les 15 écuries pouvaient abriter 848 chevaux barrés par ordinaires de 3 et occupant 1,10 m de râtelier chacun.

D’autres constructions (ateliers …) furent construites entre les deux guerres sur de nouveaux terrains expropriés par utilité publique sur les habitants. Une impasse, (la future rue Leroux) fut percée pour lotir quelques terrains. Depuis 1970 était implantée une compagnie de soutien du matériel, dont la mission consistait jusqu’alors à soutenir le 30ème GC et le 3ème RC. La cinquantaine d’hommes de la 2ème Compagnie du 7ème Bataillon du Matériel de Division Blindée (2Cie/7ème BMDB) occupait donc 4,5 ha de garages et d’ateliers. (Vargeneau) 〈125〉

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Figure 4‑6 : Plan de 1936 ; Plan en 1960 ; Plan en 2000 (Sources : archives municipales)

Phase b : la vision du quartier, démolition et réappropriation :

Le quartier Clarenthal avait vocation à redevenir un quartier civil, intégré au centre-ville. Cette intégration, aujourd’hui achevée a plusieurs étapes. D’abord, en 1990, l’Atelier du Rempart (dirigé par les architectes-urbanistes André Collin et Claude Michely) réalise pour la ville un schéma directeur afin de relier ce quartier aux voies communales environnantes, une fois les murs d’enceinte abattus. De ce schéma ont été réalisés le raccordement à la rue Lebrun, l’ouverture vers la rue des Bosquets, la construction de l’école Hubert Monnais en 1991, la deuxième tranche de 30 logements S.N.I. (Société Nationale Immobilière qui travaille pour l’Armée) en 1992, le Commissariat de Police dans un bâtiment existant (1993), la Médiathèque dans l’ancien manège (1995), l’I.U.T. de Métrologie en 1996 (coût de 24 MF pour une réalisation livrée en 1997) puis le Pôle de Ressources Technologiques (13,5 MF, livré en janvier 2001) ainsi que des logements étudiants par la C.C.L (2001) et une SCI privée (2001).

Phase c : la proposition.

Le projet de Pôle de Ressources Technologiques était associé à une forte contrainte financière. Il fallait réaliser le projet avec 6300 F H.T. du M2 tout en disposant d’équipements techniques très sophistiqués, comme par exemple un chauffage qui devait pouvoir garantir une différence de 0,5° de température maximum en continu. Un programme très détaillé a été nécessaire pour pouvoir tenir les prix jusqu’au bout de la réalisation. A titre d’exemple, les logements réalisés par la CCL ont coûté plus de 10 000 F/HT du M2, dans un mode de production et un type de suivi différent.

Phase d : la réalisation.

〈126〉 La réalisation s’est déroulée comme prévu, avec la nécessité de coordonner les accès avec les logements attenants. Seul l’espace central est resté en espace vert. Fallait-il le transformer en lotissement ? y construire un équipement? ou le laisser ainsi ? La question se pose encore aujourd’hui. Le procès de transformation du quartier qui précède, et du quartier qui suit, confronté au schéma de questionnement, conduit à la figure suivante :

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Figure 4‑7 : Confrontation au schéma de questionnement: le procès de transformation des quartiers de l’Orangerie et de la Barollière.

4.C.2. Aménagement du quartier de La Barollière :

La transformation du quartier de la Barollière peut être décrit suivant les mêmes phases logiques que la transformation du quartier de l’orangerie.

Phase a. -Appréhension globale du quartier :

Présentation du quartier de la Barollière à travers les plans, et expression du problème posé à la municipalité :

La suite des plans permet d’observer l’extension progressive de la caserne, par ajout de bâtiments autour d’une cour fermée par deux fois, entre 1783 et 1816. À la veille de la première guerre mondiale, cinq bâtiments supplémentaires ont été édifiés le long de la rue Delorme.

L’un des 23 bâtiments de la Barollière entreposait encore du matériel de mobilisation lorsque ce quartier de 3,8 ha fût définitivement désaffecté le 31 Juillet 1985. Le Groupe d’Instruction du 30ème G.C. fût la dernière compagnie à l’occuper. (Vargenau). 〈127〉

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Figure 4‑8 : 1752 ;   1793 (plan réalisé par la municipalité) 1816 (le patrimoine militaire à l’arrivée du Prince Hohenlohe) (Sources : Plans d’archives)

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Figure 4‑9 : 1839                                         1875                           1911
(Le patrimoine militaire à la veille de la 1ère guerre mondiale) (Sources archives municipales)

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Figure 4‑10 : 1936                     1960                                       2000
(Sources : Plans d’archives municipales scannés à l’échelle 1)

La ville a usé de son droit de préemption pour s’assurer de la propriété de cet ensemble immobilier de 3,7 ha., pour un montant de 2,8 MF. Ont été aussitôt démolis les murs d’enceintes et les bâtiments les plus insalubres. Puis le site fût laissée en attente, l’effort de la ville se portant d’abord sur le quartier Clarenthal.

La municipalité de Michel CLOSSE a voulu fermement aménager l’ensemble du quartier dés l’installation en Juillet 1998 de l’Hôtel des Finances dans un des deux casernements de la rue de la Barollière. La ville a été aidée par l’EPF Lorraine pour 900 kF et les crédits KONVER de 〈128〉 reconversion de casernes. Entre la ville et ce quartier, plusieurs rues et espaces délaissés sont à aménager. L’accès à cette zone avait un caractère d’abandon, de vétusté. Un carrefour neuf, décoré de 3 fresques de cavalier, très bien réalisé, renforçait paradoxalement cette sensation de chantier commencé non poursuivi. Le cœur d’îlot était encore fortement planté, d’arbres parvenant à maturité, avec des essences diversifiées : 6 tilleuls, 7 marronniers, 6 platanes, 2 robiniers « pseudo-acacia », 3 érables, 2 cerisiers et 4 autre arbres malades, à couper. Une dizaine d’arbres sont manquants. Les arbres sont disposés en trois rangées parallèles. Une allée côté Est est constituée de pavés bien visibles sous l’herbe. La rangée d’arbre centrale étant parallèle à la façade d’entrée du Gymnase, cette allée est nettement visible de tout point lorsque l’on vient du Centre-Ville à pied par la rue du Gendarme Rouge, et se trouve ainsi dans le prolongement naturel du parvis d’entrée de cet équipement.

Phase b :le parti urbanistique.

Dés lors le parti urbanistique visé a été de conserver cette intéressante disposition d’urbanisme et de le renforcer pour créer un axe facteur d’unité et de clarté d’organisation de toute la zone. Cet axe se prolongeait au delà par le chemin du cimetière jusqu’au sommet de la colline de Méhon. Ainsi conçu, cet ensemble avait vocation de créer le lien entre l’arrivée par le pont, la place des Carmes et le début de la rue du Général de Gaulle, et la colline de Méhon en longeant le cimetière. La colline de Méhon est un des plus beaux points de vue sur la ville, comme en atteste de nombreuses photos, gravures ou peintures prises depuis le sommet de la colline. Tout un ensemble de chemins se trouvent ainsi reliés entre eux, en créant une cohérence. Ces chemins étaient bien connus des militaires, puisque l’on dit que c’était leur lieu de sorties nocturne dans quelques cabanes perdues dans les jardins, lieu de rendez-vous … Ce parti d’ensemble des espaces extérieurs a été validé en Comité de Pilotage d’élus du mercredi 6 janvier 1999, et inscrit au Projet de programme de Renouvellement Urbain de Février 2000.

Phase c : le projet présenté aux élus.

La cohérence proposée aux élus est ainsi venue d’un ensemble de projets qui se complétaient les uns les autres : 〈129〉

  • 1 – Transfert du centre des impôts depuis l’aile droite du château (qui ne pouvait plus supporter le poids des alignements d’armoires de 650 kg chacune) vers un des bâtiments de La Barollière
  • 2 – Réalisation des espaces extérieurs de La Barollière
  • 3- Réalisation d’un Château d’Eau au sommet de la colline de Méhon, point culminant du parcours et d’aboutissement (ou début) d’une promenade : espace privilégié pour localiser un belvédère, une vue panoramique, une placette, un départ de promenade, ..)
  • 4 – Réhabilitation du gymnase car aucun équipement sportif n’existait encore dans le secteur Nord-Ouest de la ville.
  • 5 – Un Foyer d’Accueil Spécialisé : il s’agit d’un établissement (Établissement Public de Rosière) pouvant accueillir jusqu’à 60 adultes légèrement handicapés, qui logent sur place. (travaux réalisés de janvier à décembre 1999).
  • 6 – Le bâtiment militaire Nord est utilisé comme bâtiment de stockage de matériel pour la ville.
  • 7 – Le deuxième bâtiment de casernement a été vendu à un promoteur immobilier créatif, pour le revendre en lots de12 maisons de ville avec leur jardin avant. Le promoteur aménage 100 m², et laisse accessible plus du double de la surface dans les étages … l’opération s’est faite très rapidement en 2001.
  1. La réalisation :

Les réalisations quasi simultanées ont été coordonnées dans un emboîtement des phases de chacune des opérations, suivant la figure 4-10 ci-dessus. Le procès de transformation du territoire se vérifie également, sur l’exemple qui suit, pour la réalisation d’un château d’eau.

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Notes :

[1] « Ces wagons, accrochés les uns derrière les autres, formeraient un train dont la tête serait près de Paris quand la queue quitterait Nancy ».
[2] Lunéville à travers les plans (LtP), Tableau de synthèse de 1265 à aujourd’hui, aux pages 120 &121.
[3] Henri Baumont, Histoire de Lunéville. Préface de Ch. Pfister. Lunéville, E. Bastien, libraire-éditeur, 1900. In-8 broché, couverture illustrée, (XIII+768pp). L 8°-301, page 9.
[4] Martine Tronquart, Le patrimoine civil de Lunéville, Coll. Images du patrimoine n°140, Inventaire général des Monuments et des richesses artistiques de la France, 39 pages, 1994. A noter : l’exposé d’urbanisme général p.3 à 15, le plan de la vieille enceinte de 1598 de C.MARCHAL (p.11), de la ville fin XVIIIème (p.11), des quartiers militaires en 1824 (p.8), du manège de La Barollière (p.37).
[5] Georges DUBY, Histoire de la France Urbaine, Tome III page 115 et Michel RAGON L’Homme et les Villes, Albin Michel, 215 p., 1995, page 156
[6] Martine TRONQUART, op. cit. et Hervé THIRION, diplôme d’architecture 2000.
[7] Ouvrage collectif coordonné par Philippe VAILLANT Histoire de Lunéville de 1265 à 2000, 129p. format A3, 30 plans, schémas et synthèses, nov 2000, avec des apports notamment de Jean-Pierre CARCIOFI, Henri MACOIN, Bernard JACQUOT, Myriam RABAGLIA.
[8] Idem, « Lunéville à travers les plans de 1265 à 2000 »
[9] Ce silence sur les sources écrites rejoint certaines conclusions de la thèse de Nicolas Poirier (2007)
[10] Sur lequel a attiré notre attention M.Laurent Schmidt, conservateur de la médiathèque de Lunéville en 1999
[11] p.52 du rapport HBM et LtP p.69
[12] p.46 du rapport
[13] Ce travail rejoint la construction identitaire de l’urbanité d’une petite ville, dans les termes de la thèse de Samuel Périgois (2006).