2.G.5. Concrescence organique

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2.G.5.  Les phases du procès de concrescence organique

La dernière approche de notre constat de base concerne l’approche organique d’Alfred North Whitehead. La présentation classique des phases du procès de concrescence de la pensée organique 〈58〉 se trouve chez Donald W. Sherburne [1]. Ce schéma a été repris dans la première présentation en français de l’approche organique par Alix Parmentier dans sa thèse de 1968 [2]. Ce schéma est présenté dans la figure 2.6 ci-après.

Il est possible d’exprimer ce même schéma avec un autre symbolisme, qui respecte l’ensemble des informations du schéma ci-dessus. Pourquoi changer de symbolisme ? Pour pouvoir rendre compte de « la dichotomie entre le matériel et l’idéel » (Guy Di Méo & Pascal Buléon, Espace social). Or la schématisation par Donald W. Sherburne (ci-dessus) [3], avec les points a, b, c, d « en ligne », n’était pas adéquate. Comme par ailleurs l’analyse génétique est symbolisé par un cercle, le point de départ a été de tout symboliser par cercles, divisés symboliquement en 4 parties pour chacune des 4 phases a, b, c, d. L’utilisation des lettres a, b, c, d est la même que celle proposée par Donald W. Sherburne. Plus loin, cela permet de tracer un axe vertical entre matériel et idéel. Le résultat s’affiche dans la figure 2.7 qui suit.

Dans ces schémas (qui ont strictement la même signification), il est possible de dire simplement, à ce stade de notre enquête, les points suivants  :

  • a est la phase de sentir physique simple, ou appréhension
  • b est la phase de sentir conceptuel
  • le passage de a à b est une valorisation
  • c est la phase de proposition
  • d est la phase intellectuelle de détermination et de décision.
  • e est la phase de transition (absente du schéma de Sherburne) : elle ne sera analysée qu’en partie II seulement. 〈59〉

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Figure 2‑6 : Schéma des phases de la concrescence des entités actuelles, selon la pensée organique. Source; Donald W. Sherburne, Clés pour PR, 1966

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Figure 2‑7 : Schéma de la concrescence, d’après Donald W.Sherburne, Clés pour PR, 1966, transposé dans une nouvelle présentation quaternaire

〈60〉 Intuitivement, la correspondance peut s’établir de la façon suivante, à titre d’hypothèse de départ que devra confirmer ou modifier la suite de notre enquête [4] :

  • a, l’appréhension semble correspondre aux interactions (R4)
  • Le passage de a à b (ou « ab »), la valorisation, semble correspondre au « cadre de référence » (Vachon), aux « valeurs » (HFC et FPH), au « sentiment d’appartenance » (J. Degermann, J. Bertrand, H. Wirtz) (R3)
  • b, le sentir conceptuel semble correspondre à la vision, c’est à dire ce qui qualifie conceptuellement la direction visée : une vision est un « concept » au sens de l’expression de ce qui est visé (R1)
  • c, la proposition semble correspondre aux objectifs, c’est à dire le rapprochement entre la vision (le « concept ») et les interactions (l’appréhension) (R2)
  • d, la phase intellectuelle semble correspondre, en reprenant les termes de Bernard Vachon, à la saisie de l’ensemble des conditions nécessaires à l’exécution des actions (R5).

Les correspondances n’apparaissent évidentes que pour la phase « a » de sentir physique (qui fait clairement référence aux interactions) et la phase « c » de proposition (qui fait clairement référence aux objectifs). L’intuition est à ce stade le seul guide pour les autres phases. Une difficulté est également la présentation en quatre phases « a », « b », « c », « d », et non cinq comme dans les approches précédentes. L’hypothèse que nous formulons est que le sentiment d’appartenance (Degermann), les valeurs (HFC) et le cadre de référence (VACHON) concernent en fait toutes les phases, et correspondent donc aux flèches (les valorisations) du schéma de concrescence. Ces flèches peuvent être appelées aussi des vecteurs *. Il ne sera possible de trancher sur la pertinence de ces correspondances qu’après une présentation complète de la pensée organique, en partie II.

On observe aussi que l’ordre des phases est le même que les « directions » de l’Étude de préfiguration de Jacques Dergermann, et que les « étapes » des régulations organiques du lac suisse de Pierre Calame. Le « sentiment d’appartenance » ou « valeurs et comportements » concernent 〈61〉 l’ensemble des « directions » et des « étapes ». Bernard Vachon et la fondation HFC avancent en premier la vision et les valeurs, ce que nous pouvons appeler avec le prospectiviste Michel Godet [5] le tropisme de la vision et des scénarios. Compte tenu du fait que certains ateliers de HFC mettent en premier les valeurs, puis les interactions, et que le prospectiviste Michel Godet corrige le « tropisme de la vision » en mettant en définitive en premier l’adage « Connais-toi toi même » à travers l’identité, l’histoire, les forces, les faiblesses -c’est à dire les interactions et les éléments d’intelligibilité du réel- il est choisi de retenir pour le tableau de correspondance de synthèse et le schéma de questionnement de base l’ordre de Jacques Degermann, Pierre Calame et A.N Whitehead. Cela permet également de tester la fécondité éventuelle de la pensée organique pour exprimer les liens entre les 5 composantes de l’expérience qui semblent « invariantes ».

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Notes :

[1] Donald W. Sherburne, Clés pour Procès et Réalité de Whitehead, The Macmillan Company, New York, 1966, traduction H.Vaillant, 1993, 358 pages, dont un glossaire de 64 pages.
[2] Alix Parmentier, La philosophie de Whitehead et le problème de Dieu, 1968, Thèse. Paris, Beauchesne, 648 pp. Lexique et Bibliographie
[3] Tous ces schémas sont fournis en annexe informatique à l’adresse suivante : Annexes\Annexe08_WHITEHEAD-Textes-de-base-pedagogie\00_DESSINS-Concrescence_Anglais
[4] C’est en partie II que sera donnée l’explication détaillée du schéma. Nous sommes ici dans des hypothèses intuitives, pour définir un schéma de questionnement, qui va devenir le protocole de recherche de la thèse.
[5] Guy Loinger, Directeur d’ouvrage, La prospective régionale, de chemins en desseins, Éditions de l’Aube, DATAR, bibliothèque des territoires, Paris, 2004, 278 p, avec une introduction de Michel Godet. Voir p.12 et note 11 page 13.