9.C.Les catégories organiques

9.C.  La présentation générale des catégories organiques :

Les catégories sont de quatre types:

  • La Catégorie de l’Ultime, la Créativité, dont l’abréviation sera CU,
  • Les Catégories d’Existence, dont les abréviations seront CX1 à CX8,
  • Les Catégories d’Explication, dont les abréviations seront CE1 à CE27,
  • Les Catégories d’Obligation (ou Obligations Catégoriales) dont les abréviations sont CO1 à CO9.

Ces catégories ont été rassemblées dans le tableau ci-après, et sont décrites dans le texte exact et complet que Whitehead lui-même a placé en tête de Procès et réalité. Le but est de permettre au lecteur de former sa propre sensation de l’ensemble du schème organique dans son contexte original. En effet, tous les éléments en sont interdépendants, « organiques » et ne peuvent être saisis que les uns par les autres.

En préalable, voici quelques commentaires qui font la liaison avec les analyses des chapitres précédents qui ont utilisé ces catégories. En effet, les premières catégories de chacun des types ont été analysées le plus soigneusement possible en rapport avec leur utilisation en géographie.

  • La catégorie CX1 (l’entité actuelle) est analysée ci-dessus au chapitre 7.B. Dans la définition organique des objets géographiques l’entité actuelle remplace la notion d’actant de Michel Lussault (voir au chapitre 11, A&B). L’entité actuelle remplace la notion d’« atome » de notre scolarité. Elle est appelée à être enseignée tôt ou tard dès le plus jeune age psi l’on veut promouvoir l’« unité subjective » de la personne, plutôt que les dissociations et disjonctions actuelles (Morin [1]).
  • La catégorie CX2 (l’(ap)préhension) est analysée avec la phase « a » du procès de concrescence au chapitre 11.B.2 : on y montre comment ce terme est utilisé couramment dans le quotidien. La pensée organique est l’analyse de ce quotidien.
  • La catégorie CX3 (le nexus) est analysée au chapitre 7.C.
  • La catégorie CX4 fait partie de la préhension. C’est probablement sa dissociation quasi systématique des éléments concrets de l’expérience dans la culture moderne dualiste qui oblige à l’élever au rang de catégorie.
  • La catégorie CX5 (les objets éternels) est analysée avec la phase « b» du procès de concrescence au chapitre 8.C.1. L’objet éternel est synonyme de potentialité pure (ou générale [2]). La référence à la potentialité permet de rejoindre le quotidien, tout en permettant une utilisation technique du terme.
  • La catégorie CX6 (les propositions) est analysée avec la phase « c» du procès de concrescence aux chapitre 8C.2 à 8.C.4. Le terme « proposition » est utilisé couramment dans le langage quotidien. La pensée organique est l’analyse de ce quotidien. « Proposition » est synonyme de potentialité hybride [3] , ce qui permet de le relier à la potentialité pure (ou objets éternels) et à la potentialité réelle (les actualisations).
  • La catégorie CX7 (les multiplicités) est analysée en même temps que les nexùs(CX3),
  • La catégorie CX8 (les contrastes) fait l’objet d’une symbolisation en « triangle » dans les schémas de concrescence. Un exemple concret (le cheminement d’une proposition de l’ingénieur jusqu’au Conseil Municipal) est fourni en partie I, chapitre 2.F.1. (figure 2.14). et exemple montre comment la vie quotidienne est remplie de contrastes. Ce terme n’est pas réservé l’Art (à la peinture, à la photographie ou au cinéma) …
  • La catégorie CE9 (le procès) est analysée au chapitre 9.A. : il est montré comment ce terme est utilisé couramment dans le quotidien. La pensée organique est l’analyse de ce quotidien.
  • Les catégories d’obligation ont été analysées globalement au chapitre 8.B.6.

Aller plus loin dans la présentation serait une autre thèse. On constate que les termes techniques de la pensée organique sont des termes du quotidien (principes de Crosby présentés en partie I, chapitre 1.E.7.). La démonstration en a été faite de façon soignée pour les termes d’appréhension, de procès, de proposition, de potentialité, de contraste, de société. Elle pourrait être poursuivie avec les termes d’ objectivation, d’ actualisation, d’ harmonie, d’ intensité, de liberté, … Chacun pourra dans son expérience personnelle quotidienne, ses rencontres et ses lectures, faire ses propres observations.

Pour faire le lien à la géographie, cette insistance de Whitehead sur les faits (CX1à8, les faits concrets, manifestes, intimes, potentiellement déterminés, …) rejoint l’insistance du géographe Jean Brunhes sur les « faits essentiels » de La géographiques humaine (1956). Ses faits de géographie humaine « sont classés par ordre de complexité croissante.- de la géographie des premières nécessités vitales (besoins physiologiques fondamentaux : manger, dormir, se vêtir) jusqu’à la géographie politique et, dans son sens le plus général, à la géographie de l’histoire » [4]. Il propose alors 3 groupes et six types de faits essentiels : faits d’occupation improductive du sol (maisons et chemins), faits de conquête végétale et animale (champs cultivés et animaux domestiques), faits d’économie destructive (exploitations minérales et dévastations végétales ou animales). Avec l’accélération de l’histoire depuis 1942 et l’irruption dans la vie des hommes de nouveaux objets géographiques (hybrides entre potentialités pures -ex : mathématiques- et potentialités réelles -ex : actualisations, sociétés-), cette liste est appelée à évoluer, et les définitions de l’objet géographique de notre chapitre 11 (et son tableau synthétique en 11.B.3.) sont un pas en ce sens. On voit donc que les catégories sont la base des notions géographiques utiles à ces recherches futures.

Catégorie de l’Ultime : la Créativité.

Figure 9‑5 : Catégorie de l’Ultime (CU) (Source: PR 21 (72))

Tableau des Catégories d’existence (CX1 à CX8)
CX1 : Les entités actuelles (aussi appelées occasions actuelles d’expérience). Ou Réalités finales, ou Res Verae CX2 : Les Préhensions,

ou Faits concrets de Relation

CX3 : Les Nexus,

ou Faits Manifestes.

CX4 : Les formes subjectives,

Ou Faits intimes.

CX5 : Les Objets Eternels,

Ou Pures possibilités pour le fait d’être Déterminé spécifiquement, ou Formes de définités [5].

CX6 : Les Propositions,

ou Faits potentiellement déterminés.[6]

CX7 : Les Multiplicités,

Ou Disjonctions Pures d’Entités diverses.

CX8 : Les Contrastes,

Ou Modes de Synthèse des Entités dans une Préhension, ou Entités modélisées.

(Contrastes de contrastes, puis contrastes de contrastes de contrastes, et ainsi de suite).

Figure 9‑6 : Les Catégories de l’existence (CX1 à 8) (Source : PR 22 (73))

Tableau des Catégories d’Explication (CE1 à CE27)

(ces catégories sont présentées en 3 colonnes de 9 catégories)

CE1 : Le monde actuel est un procès, et le procès est le devenir des entités actuelles. Les entités actuelles sont donc des créatu­res ; elles sont aussi appelées « occasions actuelles ». CE10 : La première analyse d’une entité actuelle en ses éléments les plus concrets la fait apparaître comme étant une concres­cence de préhensions, qui ont leur origine dans le procès de son deve­nir. Toute analyse plus approfondie est une analyse de préhensions. L’analyse en termes de préhensions est appelée « division ». CE19 : Les types fondamentaux d’entités sont les entités actuelles et les objets éternels. Les autres types d’entités expriment seulement comment toutes les entités des deux types fondamentaux sont en communauté réciproque dans le monde actuel.
CE2 : Dans le devenir d’une entité actuelle, l’unité potentielle des multiples entités dans leur diversité disjonctive – actuelles et non-actuelles – acquiert l’unité réelle (real) de l’entité actuelle unique ; de sorte que l’entité actuelle est la concrescence réelle de multiples potentiels. CE11 : Toute préhension comprend trois facteurs :
– Le sujet qui préhende, c’est-à-dire l’entité actuelle dont cette préhension est un élément concret ;
– Le donné (datum) qui est préhendé ;
– La forme subjective, qui exprime comment ce sujet préhende ce donné.Les préhensions d’entités actuelles – c’est-à-dire les préhen­sions dont les data impliquent des entités actuelles – sont appelées préhen­sions physiques ; les préhensions d’objets éternels sont appelées préhensions conceptuelles. Les formes subjectives de ces deux types de préhensions n’impliquent pas nécessairement la conscience
CE20 : « Fonctionner » signifie apporter une détermination aux entités actuelles dans le nexus d’un certain monde actuel. Le caractère déterminé et l’identité propre (self-identity) d’une entité ne peu­vent donc faire abstraction de la communauté des différents fonctionne­ments de toutes les entités. La détermina­tion est analysable en défini­tude et position : la définitude est l’illustration d’objets éternels sélec­tionnés, et la position est le statut relatif des entités actuelles dans un nexus
CE3 : Dans le devenir d’une entité actuelle, sont en devenir également les préhensions nouvelles, les nexùs, les formes subjecti­ves, les propositions, les multiplicités et les contrastes ; mais il n’y a pas d’objets éternels nouveaux. CE12 : Il existe deux espèces de préhensions :
(a) Les « préhensions positives », appelées « sentirs » (feelings).
(b) Les « préhensions négatives » qui sont dites « éliminées du sentir ».[7] Les préhensions négatives ont aussi des formes subjecti­ves. Une préhension négative maintient son datum inopérant dans la [24] concrescence progressive des préhensions constituant l’unité du sujet.
CE21 : Une entité est actuelle quand elle a une signification pour elle-même : par quoi l’on veut dire qu’une entité actuelle fonc­tionne eu égard à sa propre détermination. Ainsi, une entité actuelle joint l’identité du soi (self-identity) à la diversité du soi (self-diversity).[8]
CE4 : La potentialité d’être un élément dans une concrescence réelle [9] fusionnant des entités multiples en une actualité unique est l’unique carac­tère métaphysique général attaché à toutes les entités, actuelles ou non [c’est-à-dire aux entités actuelles et aux objets éter­nels] [10]; et chaque élément de son univers est impliqué dans chaque concres­cence. En d’autres termes, il appartient à la nature d’un « être » d’être un potentiel pour tout « devenir ». C’est le « principe de relativité ». CE13 : Il y a de nombreuses espèces de formes subjectives, telles que les émotions, les valuations, les intentions, les adver­sions [11], les aversions, la conscience, etc. CE22 : Une entité actuelle, en fonctionnant pour elle-même, joue différents rôles dans sa formation propre (self-formation), sans perdre son identité propre (self-identity). Elle est auto­créatrice, et dans son procès de création elle transforme sa diversité de rôles en un unique rôle cohérent. Ainsi, le « devenir » est la transformation de l’incohérence en cohérence, et dans chaque cas particulier il cesse quand ce but est atteint.
CE5 : Deux entités actuelles ne peuvent avoir pour origine un univers identique, même si la différence entre les deux univers consiste seulement [23] en ce que certaines entités actuelles font partie de l’un et pas de l’autre, et que chaque entité actuelle introduit dans le monde des entités subordonnées. Les objets éternels sont les mêmes pour toutes les entités actuelles. Le nexus d’entités actuelles de l’univers corrélé à une concrescence est appelé « le monde actuel »[12] corrélé à cette concrescence. CE14 : Un nexùs est un ensemble d’entités actuelles dans l’unité de la relationalité constituée par leurs préhensions mutuelles, ou, inversement – ce qui revient au même – constituée par leurs objectivations mutuelles. CE23 : Cet auto-fonctionnement est la constitution interne réelle d’une entité actuelle. C’est l’« immédiateté » de l’entité actuelle. Une entité actuelle est dite le « sujet » de sa propre immédiateté.
CE6 : Chaque entité dans l’univers d’une concrescence donnée peut, dans la mesure où est concernée sa nature propre, être impliquée dans cette concrescence selon l’un ou l’autre de multiples modes ; mais en fait elle n’est impliquée que selon un seul mode : ce mode particu­lier d’impli­cation ne devient totale­ment déterminé que par cette concres­cence, bien qu’il soit conditionné par l’univers corrélé. Cette indétermi­nation, rendue déterminée dans la concres­cence réelle, constitue la signifi­cation du terme « potentialité ». Puisqu’il s’agit d’une indéter­mination condi­tionnée, on l’appellera « potentialité réelle ». CE15 : Une proposition est l’unité de certaines entités actuelles dans leur potentialité à constituer un nexus, avec sa relationalité potentielle partiellement définie par certains objets éternels ayant l’unité d’un unique objet éternel complexe. Les entités actuelles mises en jeu sont appelées les « sujets logiques » », et l’objet éternel complexe le « prédicat ». CE24 : Le fonctionnement d’une entité actuelle dans la créa­tion de soi d’une autre entité actuelle est l’« objectivation » de la première pour la seconde. Le fonctionnement d’un objet éternel dans la création de soi d’une entité actuelle est appelé l’« ingression » de l’objet éternel dans l’entité actuelle.
CE7 : Un objet éternel ne peut être décrit qu’en fonction de sa potentialité d’ingression dans le devenir des entités actuelles ; son analyse ne révèle que d’autres objets éternels. C’est un pur potentiel. Le terme « ingression » désigne le mode particu­lier selon lequel la potentialité d’un objet éternel se réalise dans une entité actuelle particulière, contribuant à la définitude de cette entité actuelle. CE16 : Une multiplicité consiste en de multiples entités, et son unité est constituée par le fait que toutes ses entités constituantes satis­font individuellement au moins à une condition qu’aucune autre entité ne satisfait.
Tout énoncé concernant une multiplicité particulière peut être exprimé :
– soit comme se rapportant séparément à tous ses membres
– soit comme se rapportant séparément à certains de ses membres indéfinis,
– soit comme niant l’un de ces énoncés.
Un énoncé qui ne peut être exprimé sous cette forme n’est pas un énoncé sur une multiplicité, bien qu’il puisse être un énoncé sur une entité étroi­tement associée à une certaine multiplicité, c’est-à-dire systématique­ment associée à chacun des membres de cette multipli­cité.
CE25 : La phase finale du procès de concrescence, qui consti­tue [26] une entité actuelle, est un sentir unique, complexe et complètement déter­miné. Cette phase finale est appelée la « satisfaction ». Elle est complè­tement déterminée en ce qui concerne :
a) sa genèse,
b) son caractère objectif pour la créativité transcendante,
c) sa préhension – positive ou négative – de chaque  élément de son univers.
CE8 : Une entité actuelle exige deux descriptions :

l’une qui analyse sa potentialité d’« objectiva­tion » dans le devenir d’autres entités actuelles,

l’autre qui analyse le procès qui constitue son propre deve­nir.

Le terme « objectivation » désigne le mode particulier selon lequel la potentialité d’une entité actuelle se réalise dans une autre entité actuelle

CE17 : Tout ce qui est un datum pour un sentir a une unité en tant que senti. Les nombreux composants d’un datum com­plexe ont donc une unité : cette unité est un « contraste » d’entités. En un sens, ceci signifie qu’il existe un nombre infini de catégories d’existence, puisque la synthèse d’entités en un contraste produit en général un nouveau type existentiel. Par exemple, une proposition est, en un sens, un « contraste ». Pour les fins pratiques de l’« entendement humain », il suffit de considérer quelques types d’existence de base, et de réunir en bloc les types les plus dérivés sous l’appellation de « contras­tes ». Le plus important de tels « contrastes » est le contraste « affirmationnégation » dans lequel une proposition et un nexus réalisent leur synthèse en un unique datum, les membres du nexus étant les « sujets logiques » de la proposition. CE26 : Chaque élément du procès génétique d’une entité actuelle a une fonction consistante en soi (self-consistent), et cependant complexe, dans la satisfaction finale.
CE9 : Comment une entité actuelle devient constitue ce que cette entité actuelle est, en sorte que les deux descriptions d’une entité actuelle ne sont pas indépendantes. Son « être » est constitué par son « devenir ». C’est le « principe du procès ». CE18 : Chaque condition à laquelle se conforme le procès du devenir dans un cas particulier quelconque a sa raison soit dans le caractère de quelque entité actuelle appartenant au monde actuel de cette concres­cence, soit dans le caractère du sujet qui est en procès de concres­cence.[13] Cette catégorie de l’explication est appelée « principe ontologique ». On pourrait aussi l’appeler « principe de causalité efficiente et finale ». Ce principe onto­logique signifie que les entités actuelles sont les seules raisons, de sorte que chercher une raison, c’est chercher une ou plusieurs entités actuelles. Il s’ensuit que toute condition à laquelle doit satisfaire une entité actuelle dans son procès est l’expression d’un fait concernant soit les « constitutions internes réelles » de certaines autres entités actuelles, soit la « visée subjective » qui conditionne ce procès. CE27 : Dans un procès de concrescence, il y a une succession de phases en lesquelles naissent de nouvelles préhensions par intégra­tion des préhensions des phases antécédentes. Dans ces intégrations, les « sentirs » contribuent par leurs « formes subjectives » et leurs « data » à la formation de nouvelles préhensions intégrantes ; mais les « préhensions négatives » n’y contribuent que par leurs « formes subjectives ». Le procès se poursuit jusqu’à ce que toutes les préhensions soient devenues des composants de l’unique satisfaction intégrante déterminée.

Capture d’écran 2016-04-17 à 14.21.53

Figure 9‑7 : Tableau des Catégories d’Explication (CE 1 à 27)

Capture d’écran 2016-04-17 à 14.23.16 Capture d’écran 2016-04-17 à 14.24.20 Capture d’écran 2016-04-17 à 14.25.33 Capture d’écran 2016-04-17 à 14.26.09 Capture d’écran 2016-04-17 à 14.26.34 Capture d’écran 2016-04-17 à 14.27.38

Voici maintenant le tableau des Catégories d’obligation (C01 à CO9)  

(ces catégories sont présentées en 3 lignes de 3 catégories)

CO1 : L’Unité Subjective :

Les sentirs (…) ont vocation à l’intégration en raison de l’unité de leur sujet. (…)

CO2 : L’Identité Objective :

Il ne peut y avoir duplication d’aucun élément dans le donné objectif de la « satisfaction » d’une entité actuelle, s’agissant de la fonction de cet élément dans cette « satisfaction ». (…)

CO3 : La Diversité Objective

Il ne peut y avoir coalescence de divers éléments dans le donné objectif d’une entité actuelle en ce qui concerne les fonctions de ces éléments dans cette satisfaction. (…)

CO4 : L’évaluation conceptuelle :

De chaque sentir physique dérive un sentir purement conceptuel dont le donné est l’objet éternel qui détermine la définité de l’entité actuelle ou du nexus physiquement ressenti. (…)

CO5 : La réversion conceptuelle :

Il y a une origine secondaire des sentirs conceptuels avec les données qui sont partiellement identiques aux objets éternels formant les données de la première phase du pôle mental, et partiellement différente d’eux. La diversité est une diversité pertinente par rapport au but subjectif. (…)

CO6 : La Transmutation :

(…) dans une phase ultérieure d’intégration de ces sentirs physiques simple avec le sentir conceptuel dérivé, le sujet préhendant peut transmuer le donné de ce sentir conceptuel en caractère d’un nexus (…). Le donné complet du sentir transmué est un contraste avec l’objet éternel. Ce type de contraste est l’une des significations de la notion de « qualification de la substance physique par la qualité ». (…)

CO7 : L’Harmonie subjective :

Les évaluations des sentirs conceptuels sont mutuellement déterminées par la capacité de ces sentirs à s’adapter pour être des éléments contrastés congruents avec le but subjectif. (…)

CO8 : L’Intensité Subjective :

Le but subjectif, dans lequel le sentir conceptuel trouve son origine, se rapporte à l’intensité du sentir dans le sujet immédiat, et dans le futur pertinent. (…) la détermination du futur pertinent et le sentir anticipateur permettant d’assurer son degré d’intensité sont des éléments qui affectent le complexe immédiat du sentir.

CO9 : La Liberté et la Détermination :

(…) dans chaque concrescence, (…) il y a un toujours un reste qui relève de la décision du sujet-superjet de cette concrescence. Dans cette synthèse, le sujet-superjet est l’univers, et au-delà, il y a non-être. Cette décision finale est la réaction de l’unité du tout à sa propre détermination interne. Cette réaction est la modification finale de l’émotion, de l’appréciation et du dessein. (…)

Capture d’écran 2016-04-17 à 14.28.29

Figure 9‑8 : Tableau des Catégories d’Obligation (CO 1 à 9)

___________________________________________________
Notes :

[1] Notons que si Edgar Morin est cité ici, c’est parce qu’il se montre plus critique que Whitehead sur toutes les disjonctions et dissociations des notions, qui entraînent la fragmentation des savoirs et en définitive l’éclatement de nos sociétés. Edgar Morin a également un souci pédagogique et de vulgarisation que Whitehead n’a pas eu dans ses écrits. Faire le lien entre Edgar Morin et Whitehead serait une nouvelle thèse vu l’étendue de la culture d’Edgar Morin et l’absence d’index des notions et des noms dans son œuvre. Ses bibliographies témoignent de sa connaissance de Whitehead. Eu égard à l’œuvre immense d’Edgar Morin, Whitehead présente l’avantage paradoxal d’être plus synthétique. Oserons-nous tenter un jour le rapprochement des 5 tomes de La méthode avec les 5 phases du Procès de concrescence ? Cela ne s’éloignerait pas de l’objectif commun à Whitehead et Edgar Morin d’une politique de l’homme.
[2] PR 65 c (136).
[3] PR 185e-186a
[4] Jean Brunhes (1956), p.18b.
[5] Henri Vaillant traduit cette catégorie de la façon suivante: “Les Objets Eternels, ou Purs Potentiels pour la Détermination Spécifique du Fait, ou Formes de Définitude. » ; Il précise que J-M. Breuvart traduit Forms of Definiteness par Formes de spécificité, ou Formes de définition (DSMR 517) ; J. Ladrière par formes de détermination définie. La traduction qu’il adopte est celle d’A. Parmentier (PhW 206, n. 42).
[6] Henri Vaillant traduit cette catégorie de la façon suivante :  « Les Propositions, ou États de Fait en Détermination Poten­tielle, ou Potentiels Impurs pour la Détermination Spécifique des États de Fait, ou Théories ». L’expression de potentialité hybride pour les proposition trouve sa justification sous la plume de Whitehead en PR 185e-186a dans les termes suivants : « Une proposition est une nouvelle sorte d’entité. C’est un hybride entre pures potentialités et actualisation ».
[7] Voir A. Parmentier, qui précise et commente ainsi ce passage : « Une préhension est dite positive quand elle intègre son datum dans la synthèse de l’entité actuelle en voie de concrescence. Elle est alors appelée un sentir (feeling). Elle est dite négative quand elle exclut son datum de la synthèse, quand elle l’élimine du sentir » (PhW 220)
[8] Voir DSMR II, Ch.I, p.297, où J-M. Breuvart analyse la définition de l’entité actuelle en référence à la notion de signification.
[9] Note des éditeurs américains : « Dans la marge, Whitehead a noté : « Cf. le Sophiste de Platon, 247, i.e. la diversité disjonctive est potentialité.»
[10] le crochet explicatif est de D.W.Sherburne (A key to Whitehead’s Metaphy­sics).
[11] Cf PhW 202 (n.22) qui commente ce terme d’adversionadversion, qui pourrait être traduit par attraction (voir Imm. 696), désigne une forme spéciale d’appétition à l’égard d’un objet éternel (voir PR 120) qui implique un accroissement d’intensité de la forme subjective ; l’aversion implique au contraire une diminution d’intensité (voir PR 167) »
[12] « the actual world », « monde actuel » ou « monde de l’actualité » lorsque l’adjectif actuel est trop trompeur. J-C. Dumoncel, dans son étude Whitehead ou le cosmos torrentiel (Arch. Phil., T.47, 1984, p.575) traduit actual world par monde ambiant. George L. Kline, dans son essai Forme, concrescence et concretum précise la terminologie de la façon suivante : « …une concrescence tire (activement) son origine d’un monde actuel2 (passif) (PR 22-23 [Cat. Expl. 5]), et… les concreta fonctionnent (passivement) comme des « objets pour une préhension [active] dans le présent » (AI 251 ; cf PR 65). »
[13] Cette catégorie, ce « principe général » rappelé ici, est mis en relief par J. Ladrière dans son essai Aperçu sur la philosophie de Whitehead, op. cit., p. 173.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.